Jean
15. 1-11
« Sans moi, vous ne
pouvez rien faire...
demeurez dans mon amour ».
Il est parfois difficile de
résister à la tentation du découragement, de l'amertume, de la
haine.
Juste un témoignage. Ces
dernières semaines, les personnes parmi nous qui cherchent un
logement pour accueillir « nos »
réfugiés irakiens se heurtent à des portes qui se ferment les unes
après les autres, dès que les gens comprennent que c'est pour
accueillir des réfugiés, des étrangers, du Moyen-Orient par dessus
le marché - alors même que toutes les garanties sont données !
Mais simplement à cause d'a priori, et parce que seul l'intérêt
individuel importe, au final.
Confronté
à la réalité de cette peur de l'autre, de cet égoïsme, du
racisme aussi, qui gangrène notre pays, il est tentant de juger à
son tour, d'en vouloir à ces gens, et de se laisser abattre.
Dans
un tel contexte, comment rester des disciples fidèles de
Christ, sans nous laisser entraîner loin de son sillage, hors du
chemin qu'il a tracé pour nous ?
Plus que jamais, nous avons
alors besoin de nous accrocher à lui, et à lui-seul - parce que lui
seul à la maîtrise de la situation, et parce que lui seul peut
faire naître du bien dans de telles situations.
Nous accrocher à lui en
tous temps : voilà d'ailleurs le principal commandement que
Jésus laisse à ses disciples, à la fin de l’évangile de Jean.
Juste avant sa mort, dans
ce passage bien connu des chrétiens où Jésus développe l'image du
cep de vigne et des sarments, il leur adresse deux paroles qui sont
deux repères, deux balises pour nous garder sur le droit chemin ;
Deux paroles :
d'abord : « sans moi, vous ne pouvez rien faire ».
Et puis : « demeurez dans mon amour ».
Par ces quelques mots, prononcés peu
avant sa mort, Jésus nous ramène à l'essentiel. Avec lui, pas
une religion, mais une relation, vivante, intime avec Dieu. Et
c'est dans cette relation qu'il nous appelle à demeurer.
Lecture : Jean
15.1-11
Demeurez...
voilà donc le principal commandement du passage. Demeurez en moi.
Demeurez dans mon amour.
Mais ce n'est
pas un hasard si cet appel entre en résonance avec cette autre
parole, cette déclaration sans appel, pas si évidente à
entendre : « sans moi, vous ne pouvez rien faire. ».
Littéralement : « hors de moi, si vous êtes coupés de
moi - vous ne pouvez rien faire ».
Nous avons besoin de cela aussi pour marcher fidèlement avec
Dieu.
Avant
d'aller plus loin, il faut bien comprendre qu'évoquer la vigne face
à des membres du peuple d'Israël, ce n'est pas innocent : dans
l'AT, la vigne est précisément donnée comme symbole d'Israël -
Osée et Esaïe (5) disent ainsi que « la vigne du Seigneur,
c’est la maison d’Israël ». Il l'aime et en prend soin, et
attend qu'elle porte de beaux fruits - mais elle ne produit que
l'injustice et la révolte.
Certes,
à l'époque de Jésus, le peuple cherche à produire des fruits,
cependant il voudrait les faire pousser par ses propres
forces, en obéissant
strictement à la Loi. Mais c'est voué à l'échec ; Les juifs
s'épuisent dans ces efforts, et ne parviennent à produire que de
l'injustice, de l'oppression, un légalisme qui ne fait que les
assécher.
Voilà pourquoi
Jésus leur dit : « c'est moi qui suis la vraie vigne. » ;
« hors de moi, vous ne pouvez rien faire ».
« Rien
faire ». C'est dur à entendre, mais n'est-ce pas ce que nous
découvrons par nous-mêmes, à travers nos épreuves ?
Combien de nos
difficultés viennent de ce que nous n'avons pas encore accepté,
intégré, que sans Jésus, nous sommes incapables de porter des
fruits ?
Alors,
par exemple, il arrive que le découragement nous rattrape, parce que
notre service dans l'église n'a pas été reconnu, qu'on a été
critiqué, que ce qu'on croyait une réussite s'avère un échec,
etc. Dans ces moments-là, il est facile de se dire : « je
suis un bon à rien, je n'y arriverai jamais ». Tentant de tout
laisser tomber, de quitter
la vigne - « puisque
c'est comme ça... » ; « à quoi ça sert d'être
chrétien ».
Mais osons le
dire : de telles paroles ne sont-elles plutôt l'expression d'un
orgueil blessé, et le révélateur de notre péché ? Nous
avions cru y arriver par nous-mêmes, parce que nous n'avons pas
encore pris toute la mesure de notre faiblesse, et nous avons sous
estimé en même temps la grâce de Dieu.
De
même, il arrive que nous nous sentions secs, ou fatigués d'essayer
de vivre une vie chrétienne fidèle. Peut-être parce que nous
croyons que Jésus a juste ouvert
la voie, commencé le travail et que c'est à nous de le poursuivre
avec les forces que nous avons ? Avec nos dons ? Avec pour
seules armes les enseignements et les règles bonnes qu'on a reçu
dans notre éducation chrétienne, par exemple ?
Et nous voilà au
lycée, au travail, à la fac, et il faut pardonner, par exemple. Il
faut pardonner à cet ami qui pour se moquer a posté des photos de
nous sur Facebook, ou qui parle derrière notre dos. Ou bien, alors
que Dieu nous demande de ne pas mentir, il se trouve qu'autour de
nous tout le monde augmente ses chiffres de vente en arrangeant la
vérité...
Allons nous y
arriver sans Dieu ?
Non. Vouloir
vivre ces valeurs - pardon, honnêteté - qui sont des facettes de
l'amour, en tant que simple sarment, sans la force qui vient du tronc
- ce n'est pas l'Evangile : ce n'est que de la morale,
c'est voué à l'échec, cela peut nous conduire à l'épuisement, au
découragement.
« Hors
de moi, vous ne pouvez rien faire » : si nous
l'entendons vraiment, cette parole au contraire nous libère et nous
allège ! Oui,
nous pouvons désespérer de nous-mêmes et des autres... mais en
Jésus, nous avons une espérance qui demeure, et ne déçoit pas !
Jésus nous montre
aussi vers où orienter nos efforts : « demeurez
dans mon amour ».
Demeurer ici, ça
signifie vraiment : rester délibérément, choisir d'être là,
de ne pas partir. De rester attaché. Adhérer. Choisissez en
toutes circonstances la voie de l'amour, en puisant cet amour
directement en Dieu, par Jésus-Christ.
L'image de la
vigne est tellement simple, et tellement parlante pour dire la
nécessité de rester attaché à Jésus pour vivre et faire le
bien !
Une plante, et ses
branches, dans lesquelles la sève circule, et avec elle, la force
vitale, qui permet l'apparition de beaux raisins.
Personnellement, l'image du sarment
lié au cep me touche parce qu'elle dit aussi l'amour
inconditionnel de Dieu, Celui en qui
jamais aucun rameau ne reste sec.
Ce Dieu qui nous dit : je
suis la vigne, et toi, tu es un de mes sarments. Tu n'es pas
n'importe quel bout de bois stérile qui traîne par terre en
attendant d'être brûlé, tu as ta place dans ma présence, avec tes
frères et soeurs.
Malgré
vos faiblesses et vos aveuglements,
vous êtes plantés dans mon amour, et vous allez porter de beaux
fruits, pour la gloire de Dieu.
Arrivé à ce
point de la méditation, je voudrais aborder rapidement deux
questions :
D'abord, comment
est-il possible que nous « demeurions en Jésus » ?
Qu'est-ce que cela signifie concrètement ?
Et pour finir,
comment comprendre l'idée d'être « taillé pour porter plus
de fruit » ?
Premièrement,
donc, comment peut-on « demeurer en Jésus » ?
Cela, c'est
l'oeuvre du Saint-Esprit, agissant en nous.
Ainsi, dans le
chapitre qui précède, Jésus a promis aux disciples la venue
prochaine de cet Esprit de vie, ce Consolateur, l'Esprit de vérité,
qui nous rappelle les paroles de Jésus, nous permet de les
comprendre, nous donne la force, conduit notre vie.
L'image du sarment
lié au cep exprime aussi cela.
Cette union est
assez mystérieuse. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut comprendre
entièrement, c'est quelque chose qu'on va vivre. La présence
de l'Esprit qui, comme dit Paul en Romains 5.5, « répand
l'amour de Dieu dans nos coeurs ».
C'est bien lui la
sève qui va circuler en nous, et faire régner peu à peu la vie de
Dieu, dans notre vie entière, en rayonnant de l'intérieur.
Ses manifestations
sont longuement décrites dans le Nouveau Testament :
Galates
5 : « le fruit de l'Esprit, c'est : amour, joie,
paix, patience, bonté, bienveillance, foi, douceur, maîtrise de
soi »...
Donc, c'est par l'action de l'Esprit
seulement que nous pouvons rester attachés à Dieu.
Bien sûr il ne s'agit pas de rester
passifs en attendant que Dieu agisse : le Saint-Esprit nous
est donné pour que nous fassions la volonté de Dieu, que nous
mettions en pratique les commandements de Jésus, dans tous les
aspects de notre vie.
Et redisons-le, cela
signifie essentiellement : aimer : « ce que je
vous commande, c'est que vous vous aimiez les uns les autres »
(Jn 15.17).
« Comme le Père m'a aimé, moi
aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. Si vous gardez mes
commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi j'ai gardé
les commandements de mon Père et je demeure dans son amour »
(15.9-10).
En somme, demeurer en Jésus c'est
faire la volonté de Dieu, et faire la volonté de Dieu c'est aimer
notre prochain, c'est « considérer les autres comme supérieurs
à nous-mêmes »(Phil 2), c'est « faire preuve d'un
véritable amour qui se manifeste par des actes » (1 Jn 3.18).
Voilà l'oeuvre que le Saint-Esprit
travaille à nous mettre à cœur, agissant notamment à
travers la parole de Dieu, en éclairant pour nous telle ou telle
parole qui va nous toucher dans ce que nous vivons (dans une lecture
perso, une prière, une prédication...). D'où la nécessité de
fréquenter cette parole, d'en nourrir notre esprit.
Voilà l'oeuvre pour laquelle le
Saint-Esprit nous équipe, en nous rendant capable d'aimer, et en
nous accordant des dons à utiliser pour le bien des autres, toujours
par amour.
Et c'est encore le Saint Esprit qui
conduit nos cœurs dans la prière. Car il nous faut plus que
jamais, en ces temps troublés, prier sans cesse- et
ainsi apprendre à dépendre de Dieu dans tout ce que nous
faisons.
Sur ce point, une magnifique promesse,
souvent mal comprise, nous est faite au verset 7 : « Si
vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez
tout ce que vous voudrez, et cela vous arrivera ».
Bien sûr, jamais Jésus n'a pensé
donner ici un chèque en blanc pour tous nos caprices.
C'est pour l'accomplissement de sa
volonté - et donc, encore une fois, pour la croissance de l'amour
- que Dieu promet cela. Celui qui demeure en Christ, dont le cœur
est rempli du Saint-Esprit, ne saurait vouloir autre chose que ce que
Dieu veut.
Demandant ainsi à Dieu ce qu'il veut
lui même, il sera certainement exaucé ! Quand la tentation est
là, quand la haine vous envahit, tournez vous vers moi, remettez moi
votre cœur. Dites-moi : Seigneur, viens m'apprendre à aimer.
Et je vous exaucerai.
Dernier point : comment
comprendre le verset 2 : « tout sarment qui porte du
fruit, [mon Père] le purifie en le taillant pour qu'il porte encore
plus de fruits » ?
Le but de Dieu est toujours
l'établissement de son royaume d'amour et de justice. Et tant que
le mal n'est pas vaincu, il faut que les fruits du bien poussent plus
beaux.
Voilà pourquoi, si nous
restons greffés sur le tronc, nous ne serons pas maintenus là où
nous en sommes, mais amenés plus loin pour porter « encore
plus de fruit » - plus d'amour, plus de justice, plus de
vérité - pour la gloire de Dieu.
Vous vous dites peut-être :
comment « demeurer, rester » tout en allant plus
loin ! Mais notre vie de disciples est bien régie par deux
appels : «je vous ai choisis pour que vous alliez, que
vous portiez du fruit et que votre fruit demeure » (v.16) et
« demeurez en moi ». Aller - et demeurer. En même
temps.
C'est-à-dire : allez
de l'avant, grandissez, avancez, progressez en sainteté – mais
sans jamais vous mettre « hors » de moi.
Voilà pourquoi demeurer avec Jésus
c'est prendre le risque d'être bouleversé, poussé en avant...
parce que quand la vie grandit en nous, ça fait forcément
éclater notre coquille !
Et dans ce processus de croissance,
Dieu s'applique bien à nous montrer combien « hors de lui,
nous ne pouvons rien faire » !
Il utilise les circonstances, qui nous
montrent nos limites ; les relations avec nos frères et sœurs,
pour apprendre à aimer chacun comme il est (!) - pour apprendre
d'eux, aussi quand ils nous disent par exemple : là, mon frère,
tu n'es pas dans le juste. Ou : là, tu m'as heurté, tu es allé
trop loin.
Surtout, Sa parole nous rejoindra, si
nous la méditons dans la prière, et nous permettra de voir où
nous en sommes vraiment. Elle nous dira parfois : tu vois, là,
ton intention est généreuse, tu penses être dans le juste, mais en
réalité tu es en train de sortir du plan d'amour de Dieu pour toi ;
tu es en train de te séparer du tronc ; tu perds de vue ton
prochain, pour ne plus aimer que toi-même.
Mais quelles que soient nos
expériences négatives et nos fautes, ne nous décourageons
pas. Ne quittons pas la vigne mais demeurons dans son amour.
D'autant
que cette invitation est pour nous, quelle que soit l'étape
où nous en sommes avec Dieu. Si
on est un ou une jeune qui ne sait plus trop si ce qu'il croit, c'est
à lui ou c'est juste une éducation ; si on est un chrétien
qui a déjà entendu ce texte 600 fois, ou bien quelqu'un qui le
découvre et s'interroge à son propos...
Si nous
sommes dans une phase intense avec Dieu, ou bien de ceux qui se
disent : « je crois en Dieu, mais je ne sens pas sa
présence. J'ai l'impression qu'il est loin, que mes prières ne
dépassent pas le plafond... ».
Quelle
que soit notre situation, si
nous cherchons Jésus, c'est qu'il est déjà là !
Si nous désirons la présence et l'amour de Dieu, c'est précisément
le signe que la sève de l'Esprit coule déjà en nous, attisant
notre soif, attirant nos cœurs vers Dieu.
Alors
demeurons - accrochons-nous. Continuons à chercher Dieu, dans la
Bible, dans la prière, avec les autres.
Pour
finir, je voudrais simplement lire ce que dit Jésus au verset 11 :
« je vous ai parlé ainsi pour que ma joie soit en vous et que
votre joie soit complète ».
La joie
de Dieu, en nous, complète. Magnifique cadeau que Dieu nous offre,
une joie à vivre dès maintenant dans la relation avec lui, et qui
sera parfaite dans l'éternité, lorsque le Christ sera revenu et
qu'il nous aura pris avec lui, pour que nous demeurions dans son
amour, dans sa présence, en communion avec nos frères et sœurs, et
avec le Père - pour l'éternité.
Amen.
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