BIENVENUE !

Bienvenue sur ce modeste blog.
Vous y trouverez le texte de mes prédications.
Ces textes sont livrés presque "brut de décoffrage" aussi : soyez indulgents ! Ils sont souvent circonstanciels, sans grande prétention théologique.
Mon souhait est simplement qu'ils puissent alimenter, même modestement, votre méditation de la Bible et qu'ils attisent votre appétit de cette Parole vivante, inépuisable, que Dieu adresse à chacun d'entre nous.

lundi 7 décembre 2015

Prédication du dimanche 6 décembre 2015 - Luc 22. 14-19 - La Cène, un moment de joie et de reconnaissance - à partager !


Ce matin, je voudrais prendre le temps de méditer avec vous le sens de ce rite que Jésus a institué, la veille de sa mort. 
On pourrait dire bien des choses sur le sens de cette « Cène », qu’on appelle aussi « communion » ou  « eucharistie ». Je ne ferai pas le tour des questions théologiques sur le sujet, ce matin.
Souvenons-nous avant toutes choses que la Cène est un rite, et qu’un rite est fait pour signifier justement ce qui ne peut pas être dit avec des mots. Son sens dépasse toujours les discours qu’on peut faire dessus. Comme dit A. Nouïs, « il est des temps où il est plus important de célébrer que d’expliquer ». C’est le cas pour la Cène, qui est à vivre, pas à commenter !  
Mais pour bien la vivre, il est important de mieux la comprendre ! 

Pour commencer, une question : si vous saviez que vous allez mourir dans moins de douze heures, que feriez-vous ? 
Moins de douze heures avant sa mort, Jésus, lui, réunit ses plus proches disciples pour le repas de la pâques juive. La scène se passe au début du premier siècle, à Jérusalem.


Il faut imaginer quelle ambiance électrique règne à Jérusalem ce jour-là. Dans la ville sainte, c’est bien pire que la Fête des Lumières : des foules innombrables de pèlerins Juifs du monde entier sont venus pour la fête de Pâques -  une fête très importante : lors d’un repas au rituel immuable, on se souvient de cette nuit ancienne où Dieu a libéré les Israélites de l’esclavage en Egypte, par l’intermédiaire de Moïse. 


On raconte comment Dieu a fait d’eux un peuple libre, et comment ensuite, au mont Sinaï, il leur a donné la Loi qui fait à la fois la religion et l’identité d’Israël. 
Le repas de Pâque, c’est donc un moment de joie et de reconnaissance envers Dieu ! Cette fête dit aussi que Dieu est le libérateur aujourd’hui encore - et ça résonne très fort dans cette ville occupée par les Romains, ces païens qui n’hésitent pas à profaner le Temple, provoquant la colère des juifs. 
Ainsi, l’ambiance est à la fois joyeuse et tendue. Pire qu’à la Part-Dieu la veille de Noël. Ce soir-là, partout dans Jérusalem, on se retrouve en famille, comme pour le réveillon de Noël, et l’on se prépare à sacrifier un agneau, en souvenir de ceux dont le sang marquant les portes des maisons des Israélites les a protégés de la mort, au moment de la libération d’Egypte. 



Jésus, en juif fidèle, a fait préparer le repas lui aussi. Luc insiste là-dessus : c’est Jésus qui a tout organisé, il a choisi une grande chambre, à l’étage d’une maison, et fait acheter le nécessaire. 
Là, il s’assoit à table avec ses proches, et comme tous les juifs les voilà qui commencent les festivités. 
Mais la soirée va prendre une tournure inattendue…

Lisons le récit de ce moment étonnant. 

Lecture : Luc 22.14-19


Une chose me frappe : pendant les trois années passées avec ces hommes,  Jésus a accompli des choses vraiment plus extraordinaires - marcher sur l’eau, changer de l’eau en vin, rendre la vie à des morts !
Pourtant ce qu’il transmet ce soir là est étonnement simple. Ce sont ces gestes que nous allons faire tout à l’heure : partager du pain et boire du vin dans la même coupe. 
Voilà ce qu’il a estimé important de faire, avant de mourir. 
Pourquoi ? 
Pourquoi Jésus laisse-t’il ces gestes à ses disciples, et à nous aujourd’hui ? Et qu’attend-il de nous en retour - quelle disposition de coeur, quelle attitude ? 



1. Un repas - repas de Pâques.

Commençons par une évidence : la cène est un repas ! Pas une cérémonie religieuse placée hors de la vie quotidienne. Et même si ce repas est un repas spécial, les gestes que fait Jésus ici sont ordinaires pour des juifs de l’époque : au début de chaque repas, le maître de maison priait ainsi pour exprimer sa reconnaissance à Dieu : « Bénis sois-tu, Seigneur notre Dieu, roi du monde, qui fournis le pain de la terre ». Le pain doit alors être rompu et partagé entre les convives, c’est l’usage avant chaque repas. 
Et à la fin, on fait pareil avec la coupe de vin. 
C’est précisément là, au coeur des habitudes quotidiennes, que Dieu veut rejoindre ses disciples ce soir-là, et au delà, nous rejoindre. 
Il est ce Dieu qui, en Jésus, s’assoit là, à notre table, et pour nous parler de réalités qui nous dépassent, il prend un langage qu’on connait bien : manger, boire. 

Manger du pain, symbole de vie. Boire du vin, signe de la fête et de la joie partagée. 

Ainsi, même si l’heure est grave, Jésus commence par placer le repas sous le signe de la reconnaissance envers Dieu ! Et c’est cela doit rester la note dominante de la cène : la reconnaissance envers Dieu pour ce qu’il fait pour nous. La confiance en lui. La joie ! 


En grec, le terme utilisé dans l’expression « il rendit grâce », « il exprima sa reconnaissance », son « merci » c’est eucharisteo, qui a donné le nom traditionnel de la cène, l’eucharistie. 
Eucharistie : dire merci, exprimer sa reconnaissance. 
Chara : la joie
Charis : la grâce
Tout cela se mêle dans ce repas.
Jésus y réaffirme donc sa reconnaissance et sa confiance dans le Père. Il sait quel projet de vie extraordinaire il va accomplir à travers sa mort. Il sait quelle joie, quelle grâce pour nous découleront de sa mort, douze heures après. 

2. Un repas d’adieux 
Mais il annonce aussi qu’il va mourir. Et en même temps que la joie de fêter un Dieu qui libère, au delà de la reconnaissance envers ce Dieu fidèle, pour Jésus il y a la gravité et l’émotion, car c’est aussi son repas d’adieux aux disciples. 

Comment ne pas être frappé par l’insistance de Jésus sur le fait qu’après cela il ne boira plus de vin, il ne mangera plus de pain ? On le sent ému. « J’ai vivement désiré manger cette pâque avec vous, avant de souffrir… ». 

Peut-on imaginer ce qu’a dû ressentir Jésus en sentant le pain se déchirer entre ses mains, alors qu’il disait « ceci, mon corps, qui est donné pour vous » ? Certainement il pense à ce qui va lui arriver dans quelques heures seulement, quand ce sera lui qui sera brisé, torturé. Il doit lutter intérieurement contre l’angoisse, l’envie de fuir cela.
En cette heure difficile, Jésus a besoin de la présence de ses amis et de leur chaleur pour affronter ce qui l’attend. 

Jésus sait aussi que ses disciples vont être désorientés par sa mort, aussi leur laisse-t’il ces gestes simples pour les rassurer, et parce qu’ils seront un repère, une aide, un lien entre eux et lui quand il aura été crucifié et qu’il ne sera plus là.

Voilà pourquoi, avant même de les quitter, il leur donne ce rite qui redit l’espérance et la confiance en Dieu, et qui va exprimer, par des symboles simples, le magnifique projet de vie que Dieu a pour eux. 

3. Un repas de Pâques détourné

Ce projet, Jésus l’explique alors en détournant le sens du repas traditionnel de Pâques. 
Ainsi, alors que tout a commencé selon la tradition, voilà qu’en plein milieu, Jésus casse le rituel, change le sens des gestes en prononçant des paroles incroyables : au lieu de dire, selon l’usage, « ceci est la pâque », il déclare « ceci est mon corps ». Par ces mots, il donne une signification nouvelle à ce repas : il le relie à lui-même, à sa mort proche, à sa résurrection à venir. « Mon corps, mon sang… donnés pour vous » : Jésus ne va être simplement exécuté, il va donner sa vie pour faire vivre ceux qui le reçoivent. 
Et Jésus va même plus loin : il parle de « nouvelle alliance » ! Il faut imaginer le choc pour les disciples, dont toute la compréhension du monde est basée sur l’alliance établie par Dieu avec Moïse.
Qu’est-ce qu’ils ont réellement compris ce soir-là ? Au moins, que l’heure était grave, mais qu’il y a avait de l’espoir, car Jésus parle de boire à nouveau le vin avec eux, dans l’avenir. 

Mais plus tard, ils comprendront aussi que Jésus, par sa mort sur la croix, a établi une nouvelle alliance entre Dieu et les hommes. Dans cette alliance, il ne s’agit plus d’offrir des sacrifices d’animaux pour être acquitté par Dieu : en partageant le pain et le vin, Jésus est en train d’expliquer que l’agneau de pâque, cette fois, c’est lui. 

En effet, le lendemain, sur la croix, il va donner sa vie en sacrifice - un seul sacrifice suffisant pour le pardon de tous les péchés passés, présente et à venir. Un sacrifice parfait parce que Jésus Fils de Dieu est parfait. Un sacrifice suffisant donc pour effacer toutes les horreurs commises par les hommes - de Dachau à Daesh, et au delà. 
Jésus va donner sa vie une fois pour toutes à la place de la nôtre. C’est lui qui va être condamné, pour que nous soyons libres. C’est lui qui va subir la honte et le rejet loin de Dieu, pour que nous puissions relever la tête et être réconciliés avec Dieu. 

Dans cette « nouvelle alliance », sa mort et sa résurrection occupent la place qu’occupait la sortie d’Egypte dans l’ancienne, et ses enseignements deviennent la nouvelle loi. Quand à la Terre Promise vers laquelle il conduit ceux qui lui font confiance, c’est le Royaume de paix que Dieu établira lorsqu’il reviendra. 


Cette alliance, enfin, est scellée, garantie, par le don du Saint-Esprit, comme l’explique la lettre aux Hébreux (10) : « Par une seule offrande (Jésus) a conduit à la perfection pour toujours ceux qu'il rend saints. C'est ce que le Saint- Esprit nous atteste aussi, car après avoir dit: Voici l'alliance que je ferai avec eux après ces jours- là, dit le Seigneur : je mettrai mes lois dans leur cœur et je les écrirai dans leur esprit, il ajoute : Je ne me souviendrai plus de leurs péchés ni de leurs fautes ».

Voilà ce que dit ce repas, cette « cène ». 

La Cène est donc un repas symbolique, qui n’a pas de pouvoir en lui-même. 
Ce n’est pas « une cérémonie religieuse sacrée qui nous sort de la réalité terrestre pour nous faire accéder aux sphères célestes ». Il ne s’agit donc pas de prendre le pain et le vin comme s’ils étaient efficaces pour nous purifier, nous rendre plus saints, etc. 
Il ne s’agit pas non plus de prendre ce repas pour être pardonné, comme si c’était un rituel de purification. De tels rituels sont désormais inutiles : la mort de Jésus a effacé définitivement tout ce qui nous sépare de Dieu, sans que nous ayons quoi que ce soit à faire - si ce n’est croire, lui faire confiance. Ce qui est important, donc, dans la Cène, c’est notre foi - une foi qui doit être sincère et authentique.


4. Dans quel état d’esprit prendre ce repas ? 

« Il prit une coupe, remercia Dieu… ». « Il prit du pain, remercia Dieu… ». 
« J’ai vivement désiré manger cette Pâque avec vous, avant de mourir ». 
Gravité et reconnaissance, tristesse et joie, confiance et espérance : tout cela est présent en même temps dans ce rite - mais la reconnaissance domine. 
Le Christ ressuscité nous invite à cette table, et nous pouvons nous en approcher en disant pardon, mais surtout : merci ! 

En disant pardon, bien sûr. Gravité et sérieux sont de rigueur. 
Ainsi, Paul demande à chacun d’examiner sincèrement sa relation au Seigneur, et de lui demander pardon le cas échéant. 
Gravité et sérieux devant ce que Dieu a dû faire pour nous sortir de nos esclavages, de notre orgueil, de notre aveuglement, pour nous ramener à lui. 

Mais attention ! On a parfois l’habitude de prendre la Cène en restant centré sur soi-même, en pensant qu’il nous faut surtout, à ce moment-là, examiner notre conscience, et pour mériter d’une certaine façon de prendre le repas, vite demander pardon pour tous les péchés que nous avons en tête ! Alors - ouf ! - nous pouvons participer dignement. 

Peut-être certains ont-ils connu des cultes où la menace plane sous la forme de cet avertissement donné par Paul dans la première lettre aux Corinthiens : « celui qui mange et boit sans discerner le corps de Christ mange et boit un jugement contre lui-même »
Je me souviens dans ma jeunesse d’un homme qui appuyait cela d’un air terrible et avec un regard particulièrement noir ! 

Mais si Paul nous invite à « nous examiner nous-mêmes » devant Dieu, ce n’est pas pour rester écrasé par nos infidélités : c’est pour nous ouvrir à l’amour de Dieu et à l’amour des autres ! 
Car en réalité, ce que Paul reprochait aux Corinthiens, qui ne « discernaient pas le corps », c’était de prendre la Cène sans communion, chacun dans son coin. Il y avait même des conflits et du mauvais esprit entre eux, des tensions, des jalousies. C’était chacun pour soi, chacun sur soi. 
Au contraire, la Cène est un moment centré sur Jésus et tourné vers nos frères et soeurs. 
En participant à ce repas, nous confessons ensemble notre foi dans le Christ mort et ressuscité pour nous - une confession à la fois personnelle et communautaire. 

Communautaire, parce que Jésus lui-même nous tend le pain et le vin et nous dit : « « Prenez ceci et partagez-le entre vous ». Il nous invite à la reconnaissance et à la joie ensemble : « Eucharisteo » ! 

En partageant le pain et le vin, nous proclamons que c’est le Christ qui nous unit. Nous reconnaissons que notre unité a pour base, source et fondement la mort du Seigneur pour nous. 
Autour de la table, nous sommes tous des pauvres, mais accueillis ensemble dans le Royaume de Dieu, invités à sa table. 
Nous partageons cette même espérance que le Seigneur va revenir nous prendre avec lui. 
Alors, dans l’attente de son retour, réjouissons-nous ensemble, et passons-nous la coupe et le pain comme des frères et soeurs qui partagent un même cadeau, en portant les uns sur les autres le même regard d’amour et de grâce que le Seigneur porte sur nous en ce moment. 

Enfin, il y a aussi une confession personnelle de notre foi dans la Cène : en participant à ce repas, nous nous approprions tout à nouveau les bienfaits du sacrifice de Jésus en notre faveur : le pardon de nos fautes, la réconciliation avec Dieu. Nous confirmons que le Christ est pour nous le « pain de vie », celui qui nous nourrit parfaitement. 
Du coup, si l’on ne partage pas cette foi… il faut s’abstenir de participer. On n’est pas en communion avec Dieu, comment prendre la « communion » ? 


En revanche, c’est peut-être le moment de saisir la main que Dieu vous tend. Pourquoi ne pas accueillir Jésus, maintenant, si vous ne l’avez pas déjà fait ? Lui remettre votre vie. Pendant le moment qui va suivre, pourquoi ne pas prendre la décision de lui faire confiance ? Vous pouvez le prier simplement de vous éclairer, de vous guider vers lui. 

Nous allons maintenant partager (joyeusement !) la Cène. Mais qu’en quittant ces lieux, tout à l’heure, nous ne laissions pas ici, sur un banc, la joie et la reconnaissance ! 
Dans sa simplicité, la Cène nous invite à placer toute notre vie, chacun de nos jours, sous le signe d’eucharisteo : louange, confiance et reconnaissance envers celui qui prend soin de nous au quotidien, et nous accompagnera encore demain, lundi, et mardi, et mercredi… jusqu’à la fin des temps ! 
S. Guiton





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire