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Vous y trouverez le texte de mes prédications.
Ces textes sont livrés presque "brut de décoffrage" aussi : soyez indulgents ! Ils sont souvent circonstanciels, sans grande prétention théologique.
Mon souhait est simplement qu'ils puissent alimenter, même modestement, votre méditation de la Bible et qu'ils attisent votre appétit de cette Parole vivante, inépuisable, que Dieu adresse à chacun d'entre nous.

dimanche 4 janvier 2015

Prédication – dimanche 4 janvier 2015


Luc 14 : 25-27

Texte et questions pour la réflexion et la discussion


25De grandes foules faisaient route avec lui. Il se retourna et leur dit : 

26Si quelqu'un vient à moi et ne déteste pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple. 27Et quiconque ne porte pas sa croix pour venir à ma suite ne peut être mon disciple.

- Comment comprendre le verset 26 ? Dieu veut-il qu'on abandonne notre famille ? Quelle doit être notre attitude par rapport à elle ? 

- Que signifie être disciple aujourd'hui ? Quels changements de comportement cela implique-t'il ? Quels conflits possibles, avec la famille, les proches ? 
Vivez vous de telles situations ? Quelle est alors la voie que Dieu vous demande de suivre ? 

Prédication : 

Se détacher pour mieux aimer



Après cette période des fêtes pendant laquelle des familles se sont retrouvées, avec tout le doigté que cela demande souvent pour que les choses se passent bien... le texte d'aujourd'hui risque de sonner un peu comme une provocation !
Car en ce début d'année, je vous invite à nous pencher sur l'un des discours de Jésus tel que l'évangile de Luc les rapporte, au chapitre 14 : 25-27. C'est un discours dans lequel Jésus demande... de détester son père, sa mère, ses enfants, ses frères et ses sœurs !
Bien sûr, dit comme ça, le propos a de quoi choquer. En réalité, il s'agit de tout autre chose, et c'est ce que je vous invite à voir ensemble.

Lecture Luc 14 : 25-33

Voilà comment Jésus s'adressait aux « grandes foules » qui venaient l'écouter, des foules attirées par son rayonnement, sa célébrité... et à qui il impose de sévères conditions pour le suivre, comme s'il voulait repousser au lieu d'inviter ! Reconnaissez qu'on est loin du discours de séduction !
Ce sont des paroles dures, qui peuvent surprendre par leur apparente contradiction avec le reste de l'enseignement biblique. « Si quelqu'un ne hait pas... ». Jésus n'a-t'il pas demandé au contraire d'aimer son prochain comme soi-même ?!
Et ici, le voilà qui pose cette condition étonnante pour devenir son disciple – il faut « haïr » - et qui insiste sur la difficulté, sur l'importance de la décision et ses conséquences non négligeables. « Si quelqu'un ne porte pas sa croix... »... comment comprendre ces paroles, et leur radicalité ?

Face à Jésus, la foule est assez hétéroclite. Il y a pas mal de curieux, et peu de gens véritablement en recherche de Dieu.
Aussi, Jésus va tenir des propos très radicaux déjà pour faire comprendre d'emblée à tous qu'il apporte autre chose, qui est plus qu'une sagesse ou un enseignement religieux, quelque chose de plus grand qui implique donc une rupture avec la vie ordinaire.
Jésus veut éviter qu'on ne le prenne à la légère, comme si la vie qu'il apporte pouvait être « utilisée » juste pour améliorer un peu la vie présente. Vouloir suivre Jésus ainsi, de façon superficielle, c'est passer à côté des choses, et Jésus ne veut pas cela.

C'est pour cela qu'il annonce clairement les choses : pour le suivre, un choix net va être nécessaire. Il faudra abandonner certaines choses. Et ceux qui le suivront devront le suivre jusqu'au bout.

Un choix net. En somme, Jésus pose ici la question de ce qui compte le plus : Dieu... ou notre famille ? Dieu... ou nous mêmes ?

Ce qui compte le plus. Ce qu'on préfére. C'est dans ce sens qu'il faut comprendre le mot « haïr » ici. Nous pouvons donc être rassurés !
Le terme grec traduit ainsi est souvent employé dans le sens « d'aimer moins ». En Matthieu 10 : 29, il est dit par exemple « celui qui aime plus que moi ... ». La bible du Semeur traduit : « si quelqu'un n'est pas prêt à renoncer à son père... » Luc a gardé la formulation la plus choquante probablement pour interpeller le lecteur – et avouez que ça marche !
Mais jamais Jésus ne demande de détester les autres.

C'est vraiment cette idée d'un choix, d'une priorité qu'exprime Jésus ici. Pour le suivre, il faut être prêt à placer la relation avec lui avant les autres relations, avant tout le reste. Il faut relativiser les autres engagements que nous avons par rapport à celui-ci, le plus important de tous.

Difficile ?! Certainement. Voilà pourquoi Jésus, qui souhaite des disciples qui le suivent de tout leur cœur, les met en en garde : attention, réfléchissez bien : si mon enseignement vous interpelle, s'il vous semble attractif, et que vous voulez me suivre, vous ne pourrez pas le faire du bout des lèvres. Il faudra vous engager totalement. Etes-vous prêts à cela ?

Et en ce début d'année, la question nous est posée, à nous aussi : sommes-nous prêts à faire, ou refaire, ce choix clair de suivre Jésus ?

Interrogeons-nous, pour que notre engagement reste un engagement sincère.

Préférer, donc, plutôt que détester... d'accord. Mais quand même, on peut s'interroger : pourquoi être si radical ? Est-ce qu'on ne peut pas suivre Jésus sans aller si loin ?

Par cette formule, Jésus ne prêche pas l'ascèse, c'est à dire le renoncement à tout bien terrestre. Si on considère l'ensemble de son enseignement, cela apparaît clairement. Mais dans le fond, la demi mesure n'est pas possible, parce que pour être sauvé- c'est à dire pour entrer dans la vie avec Dieu, il faut sortir complètement de ce qui nous fait mourir. Trancher est parfois nécessaire. D'ailleurs Jésus dit ailleurs que si notre œil nous fait tomber dans le péché, il vaut mieux l'arracher et entrer borgne dans la vie éternelle !!

C'est un fait, si nous voulons vivre une relation en profondeur avec lui, et tenir bon face à toutes les situations où nous serons tiraillés, secoués, tentés... un choix clair est nécessaire.

D'autant que ce qui est en jeu ici, c'est notre avancée dans la vie nouvelle avec Jésus.
Pour entrer vraiment dans cette vie centrée sur l'amour, un détachement est nécessaire. Il nous faut nous détacher de certaines choses qui nous retiennent.

En premier lieu, nous détacher de nous-mêmes. Jésus parle ainsi de « haïr sa propre vie » et de « porter sa croix ». L'entrée dans le Royaume de Dieu est à ce prix.

Attention de bien comprendre ces paroles ! Il ne s'agit pas bien sûr de se martyriser, de se faire du mal ou de chercher la souffrance, loin de là. A Jérusalem certains refont le chemin de croix et se martyrisent !! L'Ecriture nous demande au contraire de prendre soin de nos corps. L'idée là encore est celle de la priorité : se haïr soi même, c'est ne plus aimer notre vie égocentrique, ne plus lui donner la première place. C'est accepter de mettre l'amour de Christ avant notre propre volonté, notre propre ego, nos biens ; c'est être prêt à renoncer à nos propres désirs et projets, nos petites fiertés, nos petits pouvoirs... en faveur de l'accomplissement de la Parole de Dieu.
En somme, ne plus vivre centrés sur nous-mêmes, mais nous ouvrir à Christ.
Sortir de notre sentier, qui ne mène qu'à la mort, pour entrer sur celui de Jésus, qui nous conduit vers la vie éternelle.

Et comment quitter notre propre chemin, si trop de choses nous lient ?

Détester ici, c'est donc se détacher - de ses proches, de sa propre vie. Jésus parle aussi ailleurs de l'attachement à l'argent, au pouvoir, au confort.. On pourrait dire : relativiser tous les autres liens qui entraveraient cette marche avec lui.

Relativiser, remettre à leur juste place... cela ne veut pas dire « couper les ponts ». Par exemple, Jésus n'est pas un chef de secte qui amènerait ses fidèles à se couper de leur famille.

Mais bien sûr, la famille est un des lieux où les liens sont les plus forts, et souvent les plus déterminants; les attentes, les projections sont souvent énormes, et rendent le positionnement personnel plus difficile. « On choisit ses copains mais rarement sa famille... », vous connaissez la chanson. Parfois ces liens seront un obstacle à la foi.
Bien sûr, Jésus pense d'abord aux situations de conflit, pour ceux qui voudront le suivre et se mettront ainsi en porte à faux avec la tradition religieuse de leur famille, par exemple.
Plusieurs parmi nous peuvent témoigner de ces situations douloureuses où l'on doit choisir entre Christ et sa famille, jusqu'à fuir parfois celle-ci. C'est le cas dans les milieux ou les pays musulmans, mais pas seulement.

Il faut se souvenir que Jésus lui-même a du faire ce travail de détachement. Il a vécu l'essentiel de sa vie en restant sur les rails familiaux, reprenant l'entreprise familiale. Un juif pieux de Nazareth, bien ancré dans son village, sa culture, ses traditions religieuses.
Et lorsque, à l'âge où l'on a déjà bien construit sa vie, il sort de Nazareth et commence son ministère, sa famille ne comprend pas. Marc dit en 3.21 : « les gens de sa parenté sortirent pour se saisir de lui, car ils disaient ; il a perdu la raison » !

Mais sans aller jusqu'à des situations de rupture aussi extrêmes, le désir de suivre Christ peut nous amener à des tensions plus légeres avec notre famille.
La peur des conflits peut alors nous amener à des compromis qui nous étouffent, et qui sont malsains pour tout le monde.

Là encore, il s'agit plutôt de prendre du recul, de la distance.

La théologienne Litta Bassett écrit à ce propos : « Tel est toujours l'enjeu essentiel : se séparer au sens de se différencier, de se rendre in-dépendant. On peut rester fortuné ou cultiver d'intenses relations familiales, pourvu que ces biens – matériels, affectifs – ne deviennent pas la seule raison de vivre ; c'est l'antidote au fameux « mon enfant, mon conjoint, ma mère, mon père, est tout pour moi » »1.

Et elle ajoute que cette prise de distance par rapport à nos proches est la seule condition pour que l'amour véritable puisse grandir entre les autres et nous.
Voilà un dernier enseignement, fort : paradoxalement, Jésus demande de « détester » pour nous aider... à aimer.
Il demande de se détacher de ce que nous aimons... pour mieux l'aimer ! C'est à dire pour l'aimer plus sainement.

En effet, les disciples de Christ sont appelés à aimer d'un amour intense, que ce soit l'amour conjugal, paternel, maternel, filial...
Or cet amour a besoin de liberté pour grandir.
Et si nous sommes trop attachés à nos proches, trop fusionnels, si nous investissons trop sur eux - nous risquons de les étouffer ! Et au final, est-ce que ce n'est pas encore notre moi que nous servons, en croyant aimer ?
On peut penser à ces graines de champion que leurs parents poussent à l'excellence, parfois pour réaliser à travers eux ce qu'ils ont eux mêmes échoué.

Trop d'inquiétude, trop de souci pour nos proches risquent aussi de nuire à leur épanouissement. …
A trop vouloir la conversion de nos enfants - pour leur bien ! - n'allons nous pas les braquer ?
L'amour fait confiance, et il nous sera impossible de lâcher cela... si nous ne faisons pas confiance à Jésus pour le faire à notre place.
Ainsi, là encore, nous devons préférer Jésus en le laissant prendre soin de ceux que nous aimons. Lui seul, Dieu tout puissant, peut veiller vraiment sur eux. Nous détacher ainsi de nos proches pour les remettre à Dieu est une démarche saine et libératrice, et il y a de cela, aussi, derrière le « détester » de Luc 14.

Une démarche libératrice. Oui, l'amour a besoin de cette liberté pour grandir, s'épanouir, une liberté que nos attachements excessifs aux choses, à un mode de vie, à des personnes... limitent facilement. Une liberté que la peur bride - peur que nos enfants « dérivent » loin des choses de la foi... peur du changement … peur d'évoquer les questions difficiles de la foi, comme celle de la souffrance ou de l'évolution... peur de la philosophie, de la psychologie qui pourraient « détourner de Dieu »... Chaque milieu a des bêtes noires !

N'ayons pas peur, comptons sur la grâce. C'est pour cela que nous devons nous détacher, pour laisser à ceux que nous aimons le loisir de suivre leur propre chemin, en ne comptant que sur la grâce de Dieu pour les accompagner. Sinon, quelle conception de la foi auront-ils ? Une foi qui n'ose pas réfléchir. Une foi qui repose sur la peur et la méfiance. On croit en Dieu pour qu'il nous protège du risque, on croit en lui comme on croit dans une assurance ou une porte blindée.
Mais tout cela étouffe l'amour.
La peur a souvent empêché les disciples de suivre Jésus - surtout au moment de la crucifixion. Si nous avons trop peur pour nos proches, pour nous-mêmes... notre amour va s'étouffer. Il nous faut les « mettre à distance »... et les confier à Dieu. Nous confier à Dieu aussi.

Est-ce que nous comprenons maintenant que ces exigences que Jésus pose ne sont pas des règles qui enferment, mais la condition pour que notre engagement soit libre, sans pression ? Pour que l'amour entre lui et nous soit sincère et profond ?

Soyons-en assurés, Jésus veut par dessus tout nous bénir, et bénir nos familles. Mais pour cela il est nécessaire que nous lui laissions la première place, pour qu'il puisse investir notre vie, et la transformer en profondeur. Pour que le souffle de l'Esprit puisse circuler dans nos relations, que les choses, les gens, les rêves... prennent leur juste place devant Dieu, la place qui leur revient - sans excès d'attachement ou de détachement.
Alors, sommes-nous prêts à lui dire « oui », au seuil de cette nouvelle année ? Sommes-nous prêts à faire ce choix de Dieu avant tout, à le placer comme choix principal, comme ligne directrice de notre vie ?
Que nous-mêmes nous puissions nous donner entièrement à ce Dieu qui se donne le premier, sans condition.
Et si nous nous sentons bloqués dans ce domaine, disons lui, simplement. Et demandons lui l'éclairage de son Esprit pour nous aider.
Car le même Jésus qui pose aussi ces conditions a dit aussi : « je ne mettrai pas dehors celui qui vient à moi » (Jn 6.36).
Choisissons de le croire, et de lui faire confiance en toutes choses.

Amen.


Prière de consécration.

Seigneur Jésus,
je viens vers toi, totalement.
Apprends moi à relativiser
Relativiser l'importance de tout ce à quoi je tiens
Parfois à l'excès
Relativiser ma propre importance
Apprends moi à te faire confiance
A te laisser prendre soin de mes proches, prendre soin de moi
Toi tu sais ce dont nous avons besoin
Je viens à toi, totalement
Viens à mon secours dans ta grâce
Amen




1L. Basset, Aimer sans dévorer

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