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Ces textes sont livrés presque "brut de décoffrage" aussi : soyez indulgents ! Ils sont souvent circonstanciels, sans grande prétention théologique.
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dimanche 25 janvier 2015

prédication du 25 janvier 2015



Prédication du 25.01.15

Matthieu 6.5-8
La prière, une entrée dans l'intimité du Père



Il faut l'avouer, prier n'est pas si facile.

Prier vraiment, devrais-je dire.

C'est paradoxal, car il y a peu de choses qui soient aussi universelles que la prière - toutes les religions ont leur forme, leur compréhension de la chose, leurs traditions.
Et si la plupart des religions enseignent à leur fidèles comment prier - précisant la position, les paroles à prononcer, le nombre de fois... aussi surprenant que cela puisse paraître, il y a peu d'enseignements sur tout cela dans la Bible.
Du moins jusqu'à la venue de Jésus.

Dans le sermon sur la montagne, en effet, le Seigneur dit en quelques mots l'essentiel à savoir pour prier vraiment.

Cet enseignement, souvent lu dans les églises, mérite une méditation régulière.

C'est à quoi je vous invite ce matin, nous lirons en Matthieu 6.5-8.

Lecture

5 Lorsque vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites, qui se plaisent à prier debout dans les synagogues et aux coins des grandes rues, pour se montrer aux gens. Amen, je vous le dis, ils tiennent là leur récompense. 6 Mais toi, quand tu pries, entre dans la pièce la plus retirée, ferme la porte et prie ton Père qui est dans le secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.
7 En priant, ne multipliez pas les paroles, comme les non-Juifs, qui s'imaginent qu'à force de paroles ils seront exaucés. 8 Ne faites pas comme eux, car votre Père sait de quoi vous avez besoin avant que vous le lui demandiez.


Ce passage se situe juste avant le « Notre Père ». Jésus s'adresse à des gens pour qui la prière fait partie de la vie, même sociale. Mais ces juifs pieux, certainement, appliqués à suivre fidèlement la loi de Moïse, Jésus est venu les amener plus loin, vers une prière qui glorifie vraiment Dieu.
Et pour cela, il commence par leur dire ce que la prière n'est pas : « ne soyez pas comme les hypocrites » qui aiment prier ostensiblement devant tout le monde, pour qu'on les voie. Ne multipliez pas les paroles, ne répétez pas sans les penser vraiment des formules toutes faites, ou des incantations. Ce sont là finalement deux travers que tout le monde peut avoir !
Si Jésus commence ainsi par pointer du doigt des dérives fréquentes, c'est pour dire quelque chose de très important : la prière, en réalité, est plus qu'un acte, que des paroles, même justes et sincères, même inspirées par une sagesse millénaire - elle est relation vivante avec le Dieu vivant. C'est la disposition de cœur que Dieu honore, avant le contenu des paroles elles-mêmes.
Et si vous voulez entrer vraiment en relation avec ce Dieu par la prière, dit Jésus, il vous faut aller au delà de la forme, et sortir de tout cela pour vous tourner entièrement vers Dieu. En cela, la prière est un déplacement vers Dieu.

Dans ce déplacement il y a des obstacles, que nous allons évoquer rapidement, avec le moyen de les surmonter. Mais, dit Jésus, le Père vous appelle et vous attend. Et sa présence est le seul but, et la plus grande récompense de la prière.
Parcourons ensemble ces trois étapes.
D'abord, nous dit Jésus ici, la prière est un déplacement vers Dieu.
« Toi, quand tu pries, entre dans la pièce la plus retirée, ferme la porte et prie ton Père qui est dans le secret ».
Il faut mesurer quelle mise en garde ces mots contiennent.
Les prières dans les synagogues étaient conduites par un membre qui restait debout devant l'assemblée ; une invitation à conduire la prière était donc un signe de considération, de respect. C'était valorisant pour l'ego. De même pour la prière de l'après-midi, qu'on pouvait s'arranger pour faire aux endroits bien passants, histoire d'être bien vus de tous !
Le danger alors n'est-il pas d'oublier qu'on s'adresse à Dieu, et de rester centré sur soi ? On prie pour exister sous le regard des autres, ou sous notre propre regard - mais plus sous celui de Dieu. Notre piété évangélique n'est pas à l'abri non plus de ce genre de choses, qu'on peut faire inconsciemment.
Mais Jésus demande de s'éloigner de tout cela : quand tu pries, déplace-toi, laisse-toi déplacer, sors de cet univers de paraître dans lequel tu es en contrôle, en maîtrise, pour venir près de Dieu, dans ta fragilité.
« Quand tu pries, entre dans la pièce la plus retirée »... Certes, le conseil est de bon sens : pour prier, bien sûr, il vaut mieux être au calme, pour ne pas être distrait. Trouver un lieu dans lequel on est bien, un lieu paisible, spécialement dédié à la prière - ce n'est pas très « protestant », peut-être, mais c'est bénéfique ! Sans écrans, sans distractions ! Il suffit juste parfois de tourner le fauteuil de son bureau dans une direction particulière, ou un coin du canapé le matin, un coin de table de cuisine... Dieu est partout, bien sûr.
Cependant Jésus ici fait explicitement allusion à une pièce qu'on trouvait dans la plupart des maisons de l'époque, une pièce souvent sans fenêtres et qui était la seule à fermer à clé. On y mettait ce qu'on avait de plus précieux.
Une façon de dire aussi qu'entrer dans la présence de Dieu, cela se vit au cœur de la vie, et qu'il faut s'y préparer, en quelque sorte - un peu comme on se prépare à un rendez-vous, auquel on se rend dans une certaine disposition de cœur.
Jésus lui-même a donné l'exemple. Il éprouvait régulièrement le besoin de partir seul dans la montagne, pour prier intensément. Bien sûr le silence du recueillement en soi ne suffit pas. Aujourd'hui, beaucoup de gens méditent, font silence, etc. sans aucune recherche du Père Celeste. Le souci de Jésus ici est surtout d'amener à une vraie prière qui s'oppose aux pratiques superficielles.
Prier donc implique de se déplacer physiquement parfois, pour mieux être déplacé intérieurement vers Dieu. Détourner les yeux de nous-mêmes et de nos occupations et préoccupations pour regarder vers Dieu. La Bible utilise des expressions variées pour dire cela : « aspirer » à la présence de Dieu, « chercher sa face », « entrer dans sa présence ». « Se mettre à l'écart », comme on le fait pour souffler un peu au milieu de trop d'activités.
La volonté tout entière tournée vers le Père.
Un grand homme de foi du Moyen-Age disait ainsi : « prier, c'est se transporter soi-même dans le cœur et la volonté du Père »1.
Ca fait envie, n'est-ce pas ? Et pourtant nous savons bien que ce n'est pas facile à mettre en pratique, et que de nombreux obstacles peuvent entraver ce déplacement vers Dieu. Une fois la porte fermée, le plus difficile... c'est de prier !
D'abord parce que nous pouvons avoir du mal à discipliner notre cerveau, et le premier obstacle à la prière ce sont nos pensées vagabondes. « Tiens, il faut que je pense à acheter du jambon »... « Génial, qu'est-ce que je suis spirituel ! J'ai fait des progrès quand même, avant je n'arrivais pas comme ça à me lever à 6h du matin pour prier... ». Ou bien : « je dois faire ceci ou cela », « je dois dire tels mots... ».
« Ferme la porte », dit Jésus. Voilà un grand défi de la prière personnelle. Il faut délibérément laisser passer toutes ces pensées sans nous y arrêter, sans les laisser nous emporter avec elles - et penser à Dieu. Nous détourner de nous-mêmes pour le chercher, lui.
Nous sommes ainsi faits, nous pauvres humains limités, qu'un rien nous distrait de l'essentiel. En tant qu'enseignant, j'ai ainsi pu expérimenter la puissance dévastatrice d'une simple mouche qui se ballade en bourdonnant dans la classe - quelques millimètres cubes capables de pulvériser en un instant la belle explication de texte que vous avez eu tant de mal à préparer !
Mais c'est bien à nous, qui sommes faits de cette pâte-là, que Dieu s'adresse, pas à des surhommes. La prière est pour tous, elle est faite justement pour les gens les moins spirituels, pour qu'eux qu'ils cherchent sincèrement Dieu.

Une fois que nous sommes tournés vers Dieu, un autre obstacle peut se dresser, fait de fausses idées héritées, inconscientes, comme celle que nous aurions quelque chose à « faire » pour avoir droit à l'intimité de Dieu. Ces images d'un Dieu juge impitoyable, d'un Dieu distant et exigeant des sacrifices et des autoflagellations de notre part pour daigner nous accepter dans sa présence.
Et bien sûr, il y a la véritable culpabilité - quand le Saint-Esprit, activant en nous la connaissance de la Parole de Dieu, nous révèle un péché réel, qui nous sépare du Père. Comment alors nous approcher de Dieu si nos mains sont sales, notre conscience inquiète ?
Jésus ici nous indique le moyen : par la foi dans la grâce de Dieu, dans son pardon. Entrer dans la pièce le cœur vraiment repentant, confiant en ce Dieu qui pardonne.
Cette grâce est sous entendue dans ces paroles de Jésus : « quand tu pries, entre dans la pièce la plus retirée, ferme la porte ».. Cette parole fait référence à un passage d'Esaïe (26.20), une allusion qui n'a pas dû échapper aux auditeurs de l'époque, tant la connaissance de l'Ecriture était poussée. Jésus cite Esaïe : « Va mon peuple, entre dans les chambres, et ferme tes portes derrière toi ».
« La référence est riche de sens, dit H. Blocher. Le prophète annonce le passage du jugement et la grâce que Dieu fera prévaloir pour les siens, à travers ce jugement. Il évoque le première Pâque, Israël sauvé du fléau en entrant dans ses chambres, couvert par le sang de l'agneau, badigeonné sur le linteau des portes »2.
En somme, Jésus dit ici : oui, tu mérites le jugement, mais à cause de la grâce de Dieu, « sous couvert du sang de l'agneau » càd de mon sacrifice pour tes péchés, tu ne seras pas rejeté. Au contraire, tu as le droit d'entrer dans l'intimité du Père. L'accès t'est ouvert, sans limites, pour peu que tu reconnaisses tes fautes et acceptes le pardon de Dieu ».

C'est cela, prier « au nom de Jésus » - avec son autorisation. Rien ne peut plus nous faire obstacle.
Le but de la prière : un cœur à cœur avec Dieu
Et cela nous amène au but de la prière : l'entrée dans la présence même de Dieu.
« Ton Père est là, dans le secret », dit Jésus. C'est donc d'abord une promesse, que Dieu a faite depuis longtemps à son peuple : « je me laisserai trouver par vous » (Jérémie 29.14).

Dans ce lieu secret, Dieu nous devance, nous attend et nous appelle.
Est-ce que nous avons conscience ainsi que notre prière n'est qu'une réponse à celle de Dieu, qui nous prie le premier d'entrer ? L'histoire d'Israël est ponctuée de ces appels déchirants de Dieu qui supplie son peuple de revenir à lui, car tout est pardonné, car un nouveau départ est possible.
« Ton Père est là ».
« Ton Père qui est dans le secret », dit Jésus, exprimant aussi cette intimité. Dans la prière, je me place devant celui qui me connait parfaitement. Voilà pourquoi il est inutile de multiplier les paroles (le mot grec évoque un « bavardage inutile », un « babillage ») : verset 8 : « votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant que vous lui demandiez ».
Surprenant, non ? Mais alors... pourquoi prier si Dieu sait déjà tout ? Parce que prier, c'est plus que faire sa liste de courses à Dieu. N'a-t'on pas terriblement tendance à limiter la prière à cela ? L'expression de nos craintes, de nos problèmes, de nos désirs - « Seigneur, si tu pouvais me donner ce que mon cœur désire... et de préférence le modèle avec 4G intégrée... ».
En provoquant un peu, on peut dire que ce type de prière n'est pas vraiment différent de celui des païens ! En tout cas, Jésus le dit : « ne soyez pas comme les païens » - des gens pour qui les rapports au divin se limitent à des requêtes. Des prières sans déplacement, centrées sur soi - mes besoins, mes envies...

Mais... est-ce qu'on n'a pas le droit, comme on dit, de « remettre à Dieu » nos problèmes ? Si, bien sûr. Dieu est un Père qui prend soin de ses enfants, et il est patient, indulgent. Mais ce n'est qu'un premier pas vers lui. La vraie réponse à nos besoins, ce n'est pas les délivrances que Dieu voudra bien nous accorder, les consolations qu'il nous donnera par son Esprit - c'est Lui. C'est sa simple présence. C'est être avec lui, dans la communion d'un enfant avec son père.
Si quelqu'un vous dit « tu es vraiment mon meilleur ami », et qu'il ne vient vous trouver que pour vous demander des services, sans jamais vous écouter, sans prendre de temps avec vous... que pensez-vous de sa soi-disant amitié ?

Quand on aime quelqu'un, on veut juste être avec lui, ça suffit. Pas forcément besoin de parler. On a confiance, on est bien ensemble.

Le Père céleste nous offre cela, il l'attend.
Et il nous l'offre par son Esprit. C'est le dernier point de cette méditation.
« Ton Père qui voit dans le secret te le rendra » : ce Dieu qui nous appelle et nous attend nous attire aussi à lui, par le Saint Esprit.
Parfois on n'ose pas prier parce qu'on ne sait pas trop quoi dire. Certes en fréquentant une église on apprend vite les formules qui vont bien, et parfois elles sont une aide précieuse, un support pour commencer. Les Psaumes nous donnent aussi des mots pour nous adresser à Dieu. Mais pas besoin de parler non plus, redisons-le.
On peut déjà, dans un premier temps, se placer devant Dieu dans le silence, se concentrer sur qui il est, et qui nous sommes devant lui. De « qui » à « qui », dit la tradition chrétienne. Et le louer, l'adorer - « Seigneur, tu es grand...».
En outre, quel que soit notre état intérieur, Dieu nous promet l'aide de son Esprit.
L'apôtre Paul dit ainsi en Romains 8.26-27 : « l'Esprit vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas ce qu'il convient de demander dans nos prières. Mais l'Esprit lui-même intercède par des soupirs inexprimables ; et celui qui sonde les cœurs sait à quoi tend l'Esprit : c'est selon Dieu qu'il intercède en faveur des saints ».

Voilà jusqu'où va la grâce de ce Dieu qui nous porte dans son amour : quand nous nous tournons vers Lui, sincèrement par la foi, c'est Jésus lui-même qui prie en nous, par son Esprit, afin que nous puissions entrer plus profondément dans la communion avec le Père !

Conclusion :
Tel est donc le chemin que Jésus nous invite à suivre ici. En somme, il nous invite ici à passer de la religiosité à une foi vivante dans le Dieu vivant. Selon la formule de Marion Muller-Colard, « d'une religion de système - système d'idées irrationnelles construit juste pour nous rassurer - d'une croyance un peu floue, héritée de nos parents peut-être, ou un un peu perdue de vue - passer donc d'un rapport à Dieu un peu vague à une foi de relation »3 - relation personnelle, relation vivante avec le Dieu vivant, qui nous accueille par grâce, sans que nous méritions quoi que ce soit.
Déjà, Jésus ici annonce l'Evangile, qui est la Bonne Nouvelle que non seulement Dieu nous cherche, mais qu'en plus il nous ouvre lui-même l'accès à sa présence, par la foi en Jésus. Il efface lui-même les péchés qui nous séparent de lui, il enlève les cailloux sur le chemin. Par son Esprit, il appelle nos cœurs, il nous donne les mots, nous inspire les prières...

Quel amour ! « Le Père est là, dans le secret ».
Qu'attendons-nous pour le rejoindre, avec confiance ?
Que nous puissions persévérer dans la prière, tenir ferme et nous rendre avec joie à ce RDV avec Dieu et avec Sa Parole, afin que sa présence irradie nos journées, et qu'ainsi son amour nous remplisse, remplisse nos vies, et déborde sur les autres autour de nous.
Prière :
Père Céleste,
Tu m'invites auprès de toi, en Jésus.
C'est bien par lui que j'ai accès à toi, dans la prière, ô Eternel.
Non seulement grâce à sa Parole de vie, mais aussi par sa mort.
J'en prends encore conscience, aujourd'hui.
Sois loué pour ce cadeau extraordinaire que tu nous fais.

Dans le nom de ton Fils.


Amen.


1 S. Eck, Initiation à Jean Tauler, p.70, le Cerf
2 H. Blocher, in Jésus au quotidien, LLB, 42e jour.
3 Marion Muller-Colard, L'Autre Dieu, p. 66-67

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